
Dans ces temps anxiogènes où les changements climatiques menacent de bouleverser les sociétés humaines, les dystopies sont légion. En effet, les futurs apocalyptiques pleuvent tant au cinéma qu’en littérature. Ce diptyque d’Hadrien Klent vient ajouter une bouffée d’air frais en nous proposant une utopie réaliste. Ainsi, l’auteur se fait un devoir de présenter des faits étayés par des théoriciens contemporains dans les propositions de son héros Émilien Long, un économiste ayant reçu un prix Nobel. Donc, ce livre présente un futur sociétal possible dans un monde idéal où la société choisit de prendre le temps de vivre.
Résumé
Le professeur Long a gagné un prix Nobel pour sa thèse « Le Droit à la paresse au XXIe siècle ». Voilà donc que l’essai d’Émilien remportera également un grand succès littéraire. Par conséquent, il suscitera de nombreux débats dans la société française. Sa proposition phare est de réduire le temps de travail rémunéré à 15 heures par semaine. Son slogan : Le temps de vivre ! propose une révolution pacifique :
« Parce que l’obligation de travail tombe, la société tout entière se met en mouvement libérant du temps pour les gens de faire des choses, de se consacrer à des choses. D’où une hausse substantielle du bénévolat, du sport, du jardinage — c’est-à-dire une augmentation du bien que l’on fait aux autres, à soi, à la nature ».
Hadrien Klent. (2021) Paresse pour tous, éditions le Tripode, p. 112
Après un grand nombre d’interviews et de rencontres avec les gens, Émilien décidera de se présenter aux élections présidentielles françaises. À la surprise générale, il l’emportera.
Deuxième tome
Le deuxième roman du diptyque : « La vie est à nous ! » raconte la suite de cette victoire improbable. Émilien est un homme porté par des idéaux, humble et d’une grande humanité. Ce nouveau Président de la Ve République a l’intention ferme de mener à terme ses promesses électorales. Le temps de travail est réduit. Les gens découvrent des activités dans lesquelles ils peuvent se réaliser autrement et ils développent des relations dans la communauté. La France passe à l’agriculture biologique. Elle met fin de la domination des GAFAM par l’établissement de système ouvert. La diplomatie du pays fait des représentations à l’ONU pour entrainer le monde entier vers ce nouveau mode de vie. De surcroit, Émilien souffre du rôle quasi monarchique de la présidence française. Alors il proposera par voie référendaire le choix d’une coprésidence formée d’un collège de 6 présidents. Ainsi, même les coprésidents auront le temps de vivre !
Thématique
La problématique exposée dans ce roman est d’une grande actualité. Quelle est la place de l’humain dans la société ? Est-il un pion au service de la croissance économique ou est-il un individu qui explore le bonheur de la conscience d’exister ? Doit-il se définir par son travail ? Est-ce que l’accumulation de biens et d’argent mène au bonheur ? Est-il possible de construire une société différente et viable ?
L’auteur fait la promotion de la décroissance économique par un changement complet de paradigme. Les propositions et les références à Léon Blum sont fréquentes. La vision sociale présentée dans le roman est clairement à gauche de l’échiquier politique. Au lieu de vouloir plus de biens, d’argent et de pouvoir, la classe politique fait le pari que les Français accepteront de désirer le mieux, le plus durable et le partage.
Pour dépasser la frustration.
Ce diptyque présente un écho de la frustration et du désenchantement des citoyens face aux institutions politiques françaises. Néanmoins, les problématiques exprimées sont également canadiennes, québécoises, allemandes, mexicaines, belges, sud-coréennes, singapouriennes, etc. La grande désillusion politique est internationale et le recentrage proposé autour du bienêtre collectif humain est très inspirant devant les enjeux planétaires actuels. Le calcul des couts sociaux et la montée de l’IA permettent de croire qu’une nouvelle économie peut nous aider grandement dans la transition en cours pour permettre à la population de prendre le temps de vivre et de s’adapter aux changements.
Personnages
Émilien Long est le personnage principal. Il se questionne souvent. Cet homme de conviction croit qu’il faut remettre l’humain au centre des préoccupations. Il veut avoir le temps de vivre. Des gens compétents et aussi passionnés que lui l’entourent pour mener à bien les changements dans la société française. Il est également le père de deux jumeaux Pierre et Augustine. Divorcé, il a la garde partagée de ses enfants. En bon père, il veut être présent malgré ses obligations.
Une équipe
Des femmes
Éva, son éditrice, est aussi son amie. Elle le connait depuis plus de 15 ans. Elle est de bons conseils. Florence Leroy est la première ministre. Auparavant, elle occupait le poste de directrice de la fondation de l’Abbé Pierre. Johanna Serpette est directrice de recherche au CNRS. Elle est spécialiste des organisations et du management. Marguerite Dupont est une informaticienne de grand talent. Elle accuse les GAFAM d’avoir étouffé le rêve de partage des savoirs des créateurs du WEB. En tant que ministre du Numérique, elle favorisera le passage vers des systèmes ouverts.
Des hommes
Alphonse Burnous, le youtubeur, sera le ministre de l’Économie solidaire. Le jeune vingtenaire est très sérieux et il a fait un travail remarquable de vulgarisation de l’économie sur sa chaine YouTube. Remi Lachemise est un homme d’affaires hors de l’ordinaire. Un homme qui croit à l’importance de redonner au suivant. Il sera le sherpa qui guide l’industrie agroalimentaire vers la production biologique. Souleymane Coly sera le ministre des Affaires étrangères. C’est un homme très attachant, un poète et un diplomate. Le pauvre devra beaucoup voyager malgré sa peur phobique de l’avion afin de convaincre d’autres pays de suivre la France dans sa réduction du temps de travail.
Entouré d’une formidable équipe, Émilien réussira à amener les Français à créer une société plus résiliente et plus solidaire. Désormais, le temps de travail rémunéré sera partagé avec de l’engagement communautaire pour le mieux-être de toutes et de tous. Avec sa petite amie Luz Cacho-Gimenez, Secrétaire générale de l’ONU, c’est le monde entier qui commencera à désirer d’avoir le temps de vivre.
Pour en apprendre un peu plus
Hadrien Klent termine ses bouquins avec une longue bibliographie afin d’encourager les lecteurs curieux à poursuivre leurs apprentissages sur les sujets traités. « La paresse pour tous » a été vendue à 25 000 exemplaires, ce qui constitue un succès littéraire. Hadrien Klent a proposé un échange à Timothée Parrique, un économiste français, un chercheur à la Faculté d’économie et de gestion de l’Université de Lund spécialisé sur la décroissance et de la postcroissance. Monsieur Parrique a publié l’intégralité des propos échangés avec Hadrien sur son blogue.
La librairie Dialogues a produit un balado avec Hadrien Klent au sujet de « La vie est à nous ». L’auteur indique que l’idée maitresse de son roman est de réenchanter l’idée du politique et de créer un besoin de réflexion commune pour dépasser la frustration qui ne mène qu’à des excès malheureux et à un repli sur soi. Il dit et je le cite : « Il faut arriver à faire dialoguer une végane avec un chasseur.
Références
Hadrien Klent (2021) Paresse pour tous. Éditions le Tripode. 364 pages
Hadrien Klent (2023) La vie est à nous. Éditions le Tripode. 353 pages
Girard, Q. (2023). Roman politique «La vie et à nous» d’Hadrien Klent, un Élysée pour six. Parue dans Libération. Le 26 mai. En ligne: Consulté le 2 janvier 2025.
Parrique, Timothée. (2024) Réponse à Hadrien Klent. le 8 avril. En ligne: Consulté le 2 janvier 2025
Laureanne (Animatrice). (2023). 19 juillet. Les éclaireurs de Dialogue. Roman, joie et politique avec Hadrien Klent. En ligne: Consulté le 2 janvier 2025